L’art est-il devenu un produit Mass Market ?
Sur la démocratisation de l’art …
Lorsqu’il se rend entre 2005 et 2007 dans la ville chinoise de Shenzhen l’artiste et photographe allemand Michael Wolf n’est pas un touriste comme les autres. Situé en bordure de Hong-Kong, l’ancien village de pêcheurs est devenu en l’espace de quelques décennies une mégalopole tentaculaire où chacun tente de faire sa place au soleil. Un soleil rare et pâle qu’obstrue une urbanisation tous azimuts. Pour les habitants de Shenzhen, il s’agit de survivre et tous les moyens sont permis pour exploiter le boom économique et entrer sans prendre garde dans cette terrifiante faille humaine : le besoin de consommer.
C’est ainsi qu’à l’ombre des ruelles de la cité chinoise, Michael Wolf déclenche le clic-clac de son appareil et photographie des peintres copistes reproduisant à la chaîne les grands chefs d’œuvre de la peinture. Crus, réalistes, touchants, les clichés de Michael Wolf zooment sur les effets toxiques d’une certaine démocratisation de l’Art devenant entre les mains de ces faussaires d’infortune un produit de consommation banal.
Mais au-delà de ces portraits d’hommes et femmes se dresse aussi le portrait sans complaisance des acheteurs prêts à exposer au-dessus de leurs écrans plats dernier cri une Joconde Made in China aussi dénaturée que tristement ressemblante. La motivation de l’acheteur d’art est-elle encore la beauté ou le besoin de posséder a-t-il définitivement pris de pouvoir ?
Face aux portraits de ces peintres de l’ombre aussi courageux que privés de reconnaissance, il s’agit de s’interroger sur les limites d’une société qui choisit de transformer en produit Mass Market une œuvre dont la préciosité vient aussi de la rareté. Reconnu de par le monde pour ses tentatives audacieuses, Michael Wolf a l’œil d’un sociologue affuté et nous le remercions de nous éclairer sur les dérives de notre société.
Pour conclure, si vous souhaitez admirer les chefs d’œuvre de Duchamp, Van Gogh ou De Vinci nul besoin d’aller jusqu’à Shenzhen. Poussez simplement les portes d’un musée près de chez vous et ouvrez grand vos yeux sur l’original. Prendre le temps de contempler est très recommandé pour notre santé.
Pour plus d’informations concernant ce projet photographique, rendez-vous sur la page de l’excellente revue numérique dédiée à l’art contemporain Boum Bang